L'ENFANT ET LE MAITRE D' ECOLE

 

 

Dans ce récit je prétends faire voir

D'un certain sot la remontrance vaine.

Un jeune enfant dans l'eau se laissa choir,

En badinant sur les bords de la Seine.

Le Ciel permit qu'un saule se trouva

Dont le branchage, après Dieu, le sauva.

S'étant pris, dis je, aux branches de ce saule,

Par cet endroit passe un Maître d'école.

L'Enfant lui crie : Au secours, je péris

Le Magister, se tournant à ses cris,

D'un ton fort grave à contre temps s'avise

De le tancer: Ah! le petit babouin!

Voyez, dit il, où l'a mis sa sottise!

Et puis, prenez de tels fripons le soin.

Que les parents sont malheureux, qu'il faille

Toujours veiller à semblable canaille!

Qu'ils ont de maux : et que je plains leur sort!

Ayant tout dit, il mit l'enfant à bord.

Je blâme ici plus de gens qu'on ne pense.

Tout babillard, tout censeur, tout pédant,

Se peut connaître au discours que j'avance

Chacun des trois fait un peuple fort grand;

Le Créateur en a béni l'engeance.

En toute affaire ils ne font que songer

Aux moyens d'exercer leur langue.

Hé mon ami, tire moi de danger

Tu feras après ta harangue.